Homélie du 13 novembre 2022   33ème dimanche   Année C

Mal 3,19-20a     Ps 97 (98),5-9     2Th 3,7-12     Lc 21,5-19

Par le Père Jean Paul Cazes

Je ne vous apprends rien si je vous dis que le mot grec « évangile » signifie « bonne nouvelle ». La bonne nouvelle fondamentale est celle du salut offert à tous les hommes par la Passion de Jésus-Christ, lui en qui nous croyons, lui qui est né d’une femme et qui est totalement Dieu et totalement homme.

Souvent, j’entends dire que l’évangile est difficile à lire et à comprendre. Pourtant, nous connaissons quelle est la manière de le lire ; nous savons quelle est la clef qui ouvre la compréhension de chaque page. Puisque l’évangile est globalement une bonne nouvelle, il suffit de chercher, dans chacune des pages, la bonne nouvelle particulière qu’elle nous offre.

Quelle est la bonne nouvelle de ce dimanche ? « C’est par votre persévérance que vous garderez votre vie. » Entendons bien de quelle vie Jésus nous parle : il s’agit de la vie qu’il est venu nous offrir, la vie dans l’Esprit, la vie avec le Père dans le royaume de Dieu. En un mot, la vie éternelle qui a commencé de germer en nous le jour de notre baptême.

C’est donc à la lumière de cette bonne nouvelle que nous pouvons lire cette page d’évangile pour ne pas nous laisser égarer par tous ceux qui se présentent comme de nouveaux messies, ou comme des réincarnations du Christ. Internet en est rempli !

Ne nous laissons pas effrayer non plus par ce que dit Jésus au sujet de la vie du monde comme au sujet des difficultés rencontrées par ses disciples. Tout cela, nous le savons, il n’y a qu’à lire les journaux. Nous pouvons même ajouter d’autres catastrophes, des catastrophes dans le monde comme des catastrophes dans l’Eglise. Je ne vais pas en dresser la liste, vous saurez le faire aussi bien que moi.

Toutes ces catastrophes – que ce soit le covid, la guerre en Ukraine, la faute du cardinal Ricard et de tant de prêtres – tout cela bouscule notreconfiance. Sur qui, en quoi, en qui notre confiance repose-t-elle ? la question est éternelle. Déjà, au temps du prophète Malachie – c’est-à-dire environ 450 ans avant le Christ – les Hébreux traversaient une période de grand découragement et de doute. Il serait trop long de détailler ce qui leur a permis de sortir de ce découragement ; notre première lecture ne donne que quelques versets du livre de Malachie. Ces versets redisent l’espérance de la venue du Seigneur et la certitude que craindre le Seigneur – c’est-à-dire non pas avoir peur de lui, mais le respecter, l’adorer, suivre ses préceptes – apportera la guérison du cœur.

Nous, chrétiens, nous avons bien plus que Malachie. Le Christ nous a été donné, lui qui est bien plus qu’un prophète. Nous savons que le jour du Seigneur est venu et qu’il ne cesse de venir car notre Dieu est celui qui vient toujours à notre rencontre, il fait toujours le premier pas. Le jour du Seigneur est aujourd’hui, comme ce sera demain, puisque chaque jour le Christ nous offre les dons de son Esprit qui sont amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, foi, douceur et maîtrise de soi (Ga 5,22)

Notre confiance personnelle et communautaire repose-t-elle vraiment sur le Christ, dans le Christ ? Devant les difficultés, les menaces, notre seul rempart est le Christ. Bien sûr, ce n’est pas le Christ qui va trouver des solutions à la crise économique, ce n’est pas lui qui va remplir les paniers de la ménagère, ni résoudre la crise de l’énergie, ni trouver des vaccins nouveaux contre le covid, ou trouver des solutions diplomatiques entre Kiev et Moscou. Ce n’est pas lui, non plus, qui effacera d’un coup de baguette magique les crimes commis dans l’Eglise. C’est à nous de relever les manches. Mais, si nous manquons d’espérance, aurons-nous la force de chercher des solutions ? Si nous ne sommes pas accrochés à Jésus-Christ, unis à lui, nourris de lui, où trouver la persévérance nécessaire pour garder notre vie ?

Jésus-Christ n’est la solution de rien, mais l’espérance et la force pour chercher des solutions. Nous, chrétiens, nous n’avons que le nom du Christ à dire au monde. Encore faut-il être liés à lui. Comment ? Nous en connaissons les moyens :  prière personnelle, familiale, communautaire ; lecture de la Bible ou, au moins, des évangiles ; fréquentation des sacrements en général, de l’Eucharistie en particulier ; engagement au service d’autrui et particulièrement des plus pauvres Nous savons tout cela ; c’est tout cela qui nous nourrit de Jésus-Christ.

 

Dans deux semaines, l’année chrétienne nouvelle s’ouvrira. Voilà une splendide occasion pour faire le point de notre comportement de disciples ; une splendide occasion de nous préparer à accueillir le Jour du Seigneur en vivant plus intensément notre désir d’être unis au Christ. Car, nous le croyons : c’est lui qui apporte dans son rayonnement la guérison de nos découragements et de nos doutes.

 

Homélie du 6 novembre 2022   32ème dimanche ordinaire  C

1M 7,1-2+9-14     Ps 16     2Th 2,16 – 3,5     Lc 20,27-38

Par le pere Jean Paul Cazes

Au fait, qu’est-ce que c’est que la résurrection ? Quels mots utiliser pour en parler ? Comment se la représenter ? Comment la comprendre ? Quelle importance peut-elle avoir pour notre vie chrétienne ? Certes, St Paul écrit aux Corinthiens : « Si Christ n’est pas ressuscité notre prédication est vide et vide aussi notre foi. » (1 Co 15,14). La résurrection du Christ est donc le pivot de notre foi chrétienne. Mais, une fois qu’on a dit cela, que dire d’elle ? Je comprends les interrogations des apôtres. St Marc écrit en conclusion de la Transfiguration : « (Jésus) leur recommanda de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu, jusqu’à ce que le Fils de l’homme ressuscite d’entre les morts. Ils observèrent cet ordre, tout en se demandant entre eux ce qu’il entendait par « ressusciter d’entre les morts » (Mc 9,9-10) Il n’est donc pas étonnant que des sadducéens viennent interroger Jésus sur ce sujet.

Au temps de Jésus, il y avait plusieurs mouvements spirituels parmi les juifs. Les deux les plus importants étaient les pharisiens et les sadducéens. Pour faire bref, les pharisiens croyaient à la résurrection, les sadducéens n’y croyaientpas : c’est ce que l’évangile du jour précise. Souvent, pharisiens et sadducéens s’approchent de Jésus pour lui tendre un piège ; aujourd’hui, Luc ne le précise pas. Il peut y avoir des sadducéens de bonne foi qui viennent interroger le Maître pour connaître sa pensée. Certes, ils lui posent un cas de conscience un peu curieux, mais qui prend place dans ces discussions que nous appelons rabbiniques, ces discussions qui nous semblent, à nous, tirées par les cheveux, mais qui dénotent chez les juifs l’extrême attention qu’ils portent à la parole de Dieu. D’ailleurs, c’est à partir d’une citation tirée du livre du Deutéronome qu’ils abordent Jésus : « Maître, Moïse nous a prescrit … » Et c’est sur ce même registre que Jésus va leur répondre lorsqu’il dit : « Que les morts ressuscitent, Moïse lui-même le fait comprendre dans le récit du buisson ardent … » Ce récit se trouve dans le livre de l’Exode (Ex 3).

Nous sommes donc en face d’une de ces discussions dont les juifs pieux ont le secret, mais qu’il nous est honnêtement difficile de comprendre. Je ne me vois pas dire à quelqu’un qui m’interrogerait sur la résurrection : nous serons comme des anges. Sourions un peu : je ne dis pas que Jésus a tort, je dis que son argument, qui devait certainement toucher ses interlocuteurs, nous touchent peu, ou même pas du tout. Sa réponse soulève pour nous plus de questions qu’elle n’en résout. Pourtant, la résurrection est au cœur de notre foi. Comment en parler, et comment en rendre compte ? La foi chrétienne comprend évidemment une morale, mais elle est bien plus qu’une morale : elle est un attachement à une personne, la personne de Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, mort et ressuscité pour tous les hommes. Jésus est un sage, mais bien plus qu’un sage ; il est un prophète, mais bien plus qu’un prophète. Il donne un enseignement, mais bien plus qu’un enseignement : il se donne lui-même, lui, le ressuscité.

Mais ça ne résout pas notre problème. Comment parler de sa résurrection et de la nôtre ? Comment en rendre compte pour celui qui s’approche de la foi chrétienne ?

A lire et à relire ce passage, il me semble qu’une clef de compréhension se trouve dans la dernière phrase du Seigneur : « (Dieu) n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants. » Comme exemple surprenant de grands vivants, il citeAbraham, Isaac et Jacob qui sont pourtant morts depuis des lustres ! Pour comprendre que la résurrection n’est pas une chose, ou un concept, il faut être vivant soi-même. Sommes-nous des vivants ? La question peut paraître étonnante, stupide même. Cependant, elle vaut le coup d’être posée. Sommes-nous effectivement des vivants ? Les difficultés de la vie ont-elles amoindri en nous le sens et le goût de la vie ? Je parle de la vraie vie, pas de la vie de pacotille. Je parle de ce que disait Dieu par la bouche de Moïse dans le Deutéronome : « c’est la vie et la mort que j’ai mises devant vous, c’est la bénédiction et la malédiction ; choisis donc la vie pour que tu vives, toi et ta descendance, en aimant le Seigneur ton Dieu, en écoutant sa voix et en t’attachant à lui. » (Dt 30, 19-20)

On ne comprend pas la résurrection après une longue conférence, ou un cours à l’Institut catholique, même si ça peut aider. On comprend la Vie (avec un grand V) si on est vivant soi-même. Si on lutte contre ce qui entraîne à l’injustice, au renfermement sur soi, à la vengeance, à la dépréciation des autres et de soi-même. Et si on aide, comme on peut, à la croissance, à la main tendue, au pardon. J’en veux pour signe ce que dit le père de la parabole de l’enfant prodigue : « mon fils était mort, et il est revenu à la vie. » (Lc 15,24)

Jésus n’a jamais donné de cours au sujet de la résurrection : il nous appelle à vivre de son Esprit. C’est ainsi que nous comprendrons de l’intérieur de nous-mêmes ce qu’est la résurrection, comme un nourrisson comprend la vie lorsqu’il tête sa mère : « Mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère » dit le psaume 130.

En ce moment, dans notre société, nous rencontrons un nombre incroyable de sollicitations qui nous tirent vers la mort. Saurons-nous, sans discours, mais par nos choix de vie, être témoins de Celui qui nous a dit : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. » ? (Jn 14, 6)

Homélie du 1er novembre 2022   TOUSSAINT

Ap 7,2-4+9-14     Ps 23(24)     1 Jn 3,1-3     Mt 5,1-12a

par le pere Jean Paul Cazes

Je lisais récemment un vieux livre du XVIIème siècle, écrit par St François de Sales, l’évêque de Genève. Son titre : « Introduction à la vie dévote. » Comme ça fait un peu vieillot, on peut le traduire par « Introduction à la vie spirituelle. » Dès le début, au chapitre trois, St François se heurte à l’objection selon laquelle la vie spirituelle serait uniquement réservée aux moines et aux religieuses. Alors il écrit : « C’est … une erreur … que de bannir la vie spirituelle de la vie des soldats, de la boutique des artisans, de la cour des princes, du foyer des époux. »

Si je cite St François de Sales, c’est qu’il est possible de dresser un parallèle entre ce qu’il dit de la vie spirituelle et ce qui peut être dit de la sainteté. Cette sainteté, on la réserve presque spontanément d’abord aux saints et aux saintes déjà canonisés qui sont, pour la plupart, des prêtres, des religieux, des religieuses …et ensuite à quelques laïcs égarés au milieu de cette multitude ! Or, le Concile Vatican II, dans un chapitre appelé « L’appel universel à la sainteté dans l’Eglise » écrit ceci qui ressemble beaucoup à ce qu’écrivait St François de Sales : « … l’appel à la plénitude de la vie chrétienne et à la perfection de la charité s’adresse à tous eux qui croient au Christ, quels que soient leur état ou leur rang. ».Le Concile n’exagère rien, il ne fait qu’actualiser ce que dit l’Apocalypse de St Jean : « Et j’entendis le nombre …ils étaient cent quarante-quatre mille de toutes les tribus des fils d’Israël. Après cela j’ai vu : et voici une foule immense que nul ne pouvait dénombrer … »

Quel que soit notre état de vie, nous sommes tous appelés à la sainteté. Mieux : c’est dans notre état de vie et par lui que nous sommes appelés à la sainteté, que nous soyons mariés ou non, ouvriers ou ingénieurs, infirmiers ou sages-femmes, patrons ou salariés, malades, prêtres ou religieuses, sportifs, étudiants, enfants et adultes... Je suis boulanger ? C’est par ma vie d’artisan que je peux marcher vers la sainteté. Je suis directeur des ressources humaines ? C’est là que le Seigneur m’appelle. Je suis mère de famille ?  Voilà mon chemin de sainteté…

D’abord, parce que nous sommes membres de l’Eglise qui est sainte. Nous l’affirmons dans le Credo. Certes, il faut un brin de culot pour parler de la sainteté de l’Eglise dans un moment où nous sommes tous blessés, salis par tant de scandales. Mais cette Eglise, constituée uniquement par les pécheurs que nous sommes tous, est sainte parce qu’elle est, fondamentalement, le Corps du Christ. C’est de ce Corps saint que nous sommes les membres ; nous sommes comme enveloppés par la sainteté du Dieu fait homme, lui qui a répandu sur l’humanité entière son Esprit de sainteté.

Dans cette Eglise sainte, nous avons été baptisés ; et je salue celles et ceux d’entre nous qui se préparent au baptême. Et parce que nous sommes baptisés et confirmés, nous avons reçu la dignité de fils et de filles de Dieu. C’est si grand, si incroyable même, que St Jean en est comme bouleversé lorsqu’il écrit – nous l’avons entendu dans notre seconde lecture : « Voyez quel grand amour nous a donné le Père pour que nous soyons appelés enfants de Dieu – et nous le sommes. »  Si nous sommes vraiment les enfants de Dieu par le baptême, alors nous portons le nom de notre Père qui est le Saint d’Israël, le Saint par excellence. Quand St Paul écrit aux chrétiens de Rome, il les nomme saints par l’appel de Dieu (Ro 1,7). Quand il écrit aux Corinthiens, il écrit « à l’Eglise de Dieu qui est à Corinthe, ainsi qu’à tous les saints qui se trouvent dans l’Achaïe entière. » (2 Co 1,1) Quand il écrit aux chrétiens d’Ephèse, il dit : « Paul, apôtre de Jésus-Christ par la volonté de Dieu, aux saints et aux fidèles … » (Eph 1,1) Quand il écrit aux Philippiens, il dit : « Paul et Timothée, à tous les saints en Jésus-Christ qui sont à Philippes … » (Ph 1,1) Je pense qu’il n’est pas besoin de préciser que ceux à qui il écrit sont bien vivants ; et pourtant, il les appelle « saints » alors qu’ils sont aussi pécheurs que nous. S’il nous écrivait, il dirait : « Paul apôtre, aux saints qui vivent à Courbevoie. »

Mais l’objection arrive aussitôt, et c’est toujours la même, de Toussaint en Toussaint : nous ne sommes pas parfaits ; c’est exact. Mais il y a méprise entre sainteté et perfection. A part Jésus et Marie, aucun saint n’est parfait. Comme disait je ne sais plus qui, un saint est un pécheur pardonné. La sainteté et la perfection sont une vocation et un chemin, le perfectionnisme est une maladie. Je viens de lire un article qui montre que, selon une enquête de l’IPSOS, un français sur deux souffre de perfectionnisme de façon quotidienne, ce qui en fait l’une des causes les plus fréquentes de stress au travail et dans la vie courante. La conclusion de cette enquête recommande une pratique régulière d’un sport ou (je vous le donne en mille) ou de la méditation ! Extraordinaire IPSOS qui en arrive à la même conclusion de tant et tant de maîtres spirituels au long de l’histoire de l’Eglise : pour trouver la paix, pratiquer la méditation. Pour se défaire du perfectionnisme et rechercher la vraie perfection liée à la sainteté, accepter de prier (et de faire un peu de sport !)

Plusieurs conclusions.

L’Eglise est sainte ; elle est le Corps du Christ ; elle rassemble ceux qui nous ont précédés et que nous fêtons aujourd’hui, et nous qui cheminons encore vers le royaume de Dieu.

L’Eglise est composée de pécheurs; or Jésus est venu chercher et sauver ce qui était perdu : c’est l’évangile de dimanche dernier.

Nous sommes pécheurs, mais notre Père, grâce à Jésus, fait vraiment de nous ses fils et ses filles ; il partage avec nous sa sainteté.

La sainteté de Dieu est en nous, comme un don ; il dépend de nous d’y croire et de la déployer dans l’état de vie dans lequel nous sommes. Ce que nous sommes déjà est appelé à être totalement vrai dans la lumière du royaume de Dieu, là où vivent celles et ceux que nous honorons aujourd’hui.

Je termine par une phrase de la règle de St Benoît, une phrase qui ne manque pas d’humour : « Ne pas vouloir être appelé saint avant de l’être, mais l’être, afin que cela devienne vrai. » (cha. IV, verset 62)

 

Nouvelles du jardin partagé

Notre petite équipe de bénévoles a le plaisir de vous annoncer que nous avons créé la première zone de plantation de fleurs à la maison paroissiale.

Un grand merci aux bénévoles pour leur temps et aux personnes qui ont contribué par leurs dons matériel et/ou financiers à cette première réalisation .
 

Homelie du 23 octobre 2022   30ème dimanche ordinaire   Année C 

Ben Sira 35, 15b-17+20-22a     Ps 33     2 Tim 4,6-8+16-18     Lc 18, 9-14

 

Nous connaissons tous l’épisode Marthe et de Marie ; c’est un épisode qui, généralement, est mal aimé des dames qui pensent que Jésus méprise les humbles travaux ménagers. C’est une fausse lecture ; Jésus ne méprise personne. Il ne demande pas de choisirentre les deux sœurs, même s’il affirme que Marie a choisi la meilleure part. Il ne nous demande pas de choisir : il nous demande d’être en même temps (comme dirait …) Marthe et Marie. Il souhaite que notre action soit portée et soutenue par la prière et l’écoute de sa Parole, comme il souhaite que notre prière soit enrichie par notre action. Nous, nous opposonsles deux ; lui, il les réunit.

De même pour la parabole d’aujourd’hui. Jésus ne nous demande pas de choisir entre le pharisien et le publicain, du moins entre ce que fait de bien le pharisien, et l’humble attitude du publicain.  Car ce que fait le pharisien est bien : il jeûne deux fois par semaine (ce qui pourrait être profitable à notre santé) ; cela nous est rappelé chaque année, le mercredi des Cendres. Il verse le dixième de tout ce qu’il gagne, coutume que notre Moyen Age avait gardée par la dîme ; ça me permet de remercier tous ceux d’entre vous qui ont pensé – ou qui sont en train de penser – à cotiser au denier du culte. En plus, notre pharisien affirme qu’il n’est ni voleur, ni injuste, ni adultère ; dont acte ! C’est comme cela qu’il faut se comporter, on ne peut pas dire le contraire. Et même, de tout cela, il rend grâce, il remercie le Seigneur. Cela aussi est un bon rappel pour nous ; nous savons demander, ce qui est normal. Mais savons-nous remercier au moins autant que nous savons demander ? Je crois (mais je n’en suis pas certain) que c’est Péguy qui disait : « Il faut être poli avec le Bon Dieu. » Nous sommes si souvent des enfants impolis et ingrats !

Donc, le pharisien de notre parabole fait de bonnes choses ; il serait bon de nous inspirer. Mais il gâte tout en se comparant et en généralisant. En dressant la liste de ce qu’il fait, il donne, en creux, la liste de ce qu’il suggère que les autres hommes ne font pas. Il affirme : « Je ne suis pas comme les autres hommes. » Il accuse donc tous les autres hommes d’être voleurs, injustes et adultères. Voilà une généralisation pour le moins hâtive. Qu’en sait-il ? L’autre leçon de cette parabole pourrait bien être d’apprendre à ne pas porter de jugements sur autrui, que ce soit dans les relations de travail, de voisinage ou même de famille.

Du publicain, on ne sait pas trop ce qu’il fait ; contrairement au pharisien, il ne dresse aucune liste. On peut cependant imaginer les raisons pour lesquelles il se reconnaît pécheur. Nous connaissons, dans les évangiles, d’autres publicains en chair et en os : Zachée au chapitre 19 de st Luc. Si vous allez à Jéricho, on vous montrera le sycomore, aujourd’hui tout vieux et tout rabougri, sur lequel il est censé être monté pour guetter le passage du Seigneur. L’autre publicain de l’évangile est Matthieu, évidemment. Pourquoi les publicains sont-ils pécheurs ? Non pas parce qu’ils manipulent de l’argent, mais parce qu’ils sont toujours tentés de récupérer bien plus sur le dos de leurs compatriotes que ce qu’ils ont donné à Rome ; Zachée est clairement un voleur. De plus, à cause de cela, les pharisiens collaborent avec les romains qui sont non seulement des envahisseurs, mais, surtout, des païens.

Si déjà cette parabole nous aidait à retrouver ou à affermir une bonne morale fondamentale, elle aurait fait du bon travail. Mais Jésus n’est pas venu nous donner une morale : pour cela, l’Ancien Testament est suffisant, il suffit de l’appliquer. Par contre, Jésus est venu insuffler en nous la foi en lui, lui qui est le Sauveur universel. Son nom même l’indique : « Jésus » signifie « Dieu sauve. Mais il sauve de quoi et qui sauve-t-il ?

Il nous sauve de notre incapacité humaine d’atteindre Dieu par nos propres capacités. C’est cela qu’il reproche aux pharisiens de son temps et du nôtre : il leur reproche non pas d’être vertueux, mais de croire que c’est par leur seules forces et par leurs seuls mérites qu’ils seront ajustés à Dieu. Il leur reproche non pas leurs bonnes œuvres, mais de penser que ces bonnes œuvres sont capables, par elles-mêmes, d’atteindre Dieu. Il leur reproche de ne pas croire en lui qui vient faire le lien entre Dieu et l’homme, lui qui est à la fois Dieu et homme.

Si le publicain de notre parabole est justifié c’est-à-dire ajusté à Dieu comme deux pièces d’orfèvrerie sont ajustées l’une à l’autre, ou comme une note de musique est juste par rapport aux autres notes c’est que ce publicain ose reconnaître devant Dieu qu’il est pécheur et qu’il demande l’aide divine pour se relever. Contrairement au pharisien, il n’a rien à présenter à Dieu, à part son repentir et son désir immense de miséricorde.

Jésus est venu proposer le salut à tous les hommes, aux pharisiens comme aux publicains ; de son côté à lui, le travail est accompli, si je puis dire. De notre côté, il suffit seulement de dire : « J’accepte. » Comme Marie lors de l’Annonciation : Dieu a tout accompli en elle mais il a choisi d’avoir besoin du « Oui » de Marie.

Et ce simple « oui » qu’il attend de nous comme de Marie, est le premier pas vers le salut, ou vers la résurrection, ce qui est une autre manière de présenter les choses. Car la dernière phrase de notre évangile est : « Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. »Il y a là bien plus et bien autre chose qu’une leçon de morale, ou même d’humilité. Qui s’est abaissé pour être relevé sinon Jésus lui-même ?  Nous reconnaître pécheurs devant lui est bien autre chose que souhaiter un bon coup d’éponge spirituelle. C’est demander et accueillir le salut, c’est-à-dire les premières lueurs de la résurrection.

 

 

 

 

 

PROJET EGLISE VERTE JARDIN PARTAGE 

 

 

Dans le cadre de la démarche Eglise Verte de la paroisse, nous démarrons un jardin partagé.

Nous le voyons comme un trait d’union entre les paroissiens pour créer des échanges, des moments de partage fraternels avec un but commun : embellir notre Maison Paroissiale.

 

Vous pouvez nous aider en nous fournissant du matériel, selon vos possibilités, dans la liste suivante (en caractères gras : les éléments prioritaires) :

1-Pour fabriquer des « carrés jardiniers » : 30 caillebottis en bois (50cmx50cm), 2 rouleaux de géotextile (Longueur 50 m sur 1 m large), 4 jardinières en bois (L : 80 cm/l : 36 cm/h : 52 cm)

2-Pour travailler dans les « carrés jardiniers » : 3 kits du jardinier (3 petites pelles, 3 petits râteaux, 3 sécateurs), un arrosoir, 2 pelles-bêches, 2 râteaux de jardinier 14 dents

3-Un composteur d’une capacité de 400 litres et un réservoir pour récupérer l’eau de pluie d’unecapacité de plus de 500 litres

4Du terreau : au total nous avons besoin de 100 sacs de 60 litres de terreau universel

5-Des plantes :

Des bulbes de fleurs (narcisses, jonquilles, primevères, tulipes et jacinthes)
3 Assortiments de 200 bulbes (conditionnés, prêts à planter)
10 arbustes d’ornement de moins d’un mètre, 5 ceps de vigne, des plantes aromatiques (laurier, thym, romarin)

6Si vous devez déménager prochainement, n’hésitez pas à nous laisser les plantes que vous ne souhaitez pas emporter.

 

Vous pouvez également nous soutenir par chèque à l’ordre de la Paroisse Saint-Pierre Saint-Paul de Courbevoie, avec un petit mot au dos du chèque précisant « jardin partagé ».

 

Pour la réception des dons en nature (points 1 à 6), merci de contacter l’équipe en charge du jardin partagé à l’adresse mail ci-après : nous conviendrons avec vous d’un rendez-vous.

 

jardinpartage.spspcourbevoie@gmail.com

 

Et surtout, n’hésitez pas à parler de notre projet de jardin partagé autour de vous, à vos amis, etc…

Quelle joie ce sera de voir dans notre église, au pied de l’autel, un beau bouquet de fleurs provenant du jardin partagé !

 

UN GRAND MERCI POUR VOTRE AIDE ! NOUS COMPTONS SUR VOUS !

 

Patrick Latournerie et toute l’équipe du jardin partagé

Homelie du 2 octobre 2022   27ème dimanche   Année C

Ha 1,2-3 ; 2,2-4     Ps 94     2Tim 1, 6-8+13-14     Lc 17, 5-10

Par le Père Jean Paul Cazes

Nous sommes en présence d’une des formes de l’humour de Jésus. L’arbre qui se déracine et qui va se planter dans la mer est à mettre en parallèle avec lamontagne qui, dans l’évangile de St Marc, fait la même chose : « si quelqu’un dit à cette montagne « Ote-toi de là et jette-toi dans la mer » et s’il ne doute pas en son cœur, mais croit que ce qu’il dit arrivera, cela lui sera accordé. » (Mc 11,23) En st Marc, il ne faut pas douter ; en st Luc, il suffit d’avoir de la foi gros comme une graine de moutarde, ce qui n’est pas grand-chose. Ni vous ni moi n’avons l’équivalent d’une graine de moutarde de foi dans le cœur, heureusement d’ailleurs, car alors nos plages risqueraient de ressembler à la forêt amazonienne.

Je n’ai pas étudié la question, mais il me semble bien que ces images d‘arbre ou de montagne dans la mer sont des images de l’humour juif. L’humour de Jésus est bien celui de son peuple. Trop souvent, nous nous représentons Jésus grave, solennel. Grave, certes ! Ce qu’il vient nous révéler est nécessaire à notre salut. Grave, évidemment ! Il donne sa vie. Mais ça ne l’empêche pas d’avoir beaucoup d’humour. Il faut apprendre à le voir sourire lorsqu’il raconte plusieurs de ses paraboles ; c’est aujourd’hui le cas.

Les apôtres se sont tournés vers lui pour lui demander : « Augmente ne nous la foi ! »  Je ne sais pas sur quel ton ils ont demandé cela. Sur le ton de l’humilité ? Sur celui de la revendication ? De l’amertume ? ou de la simple constatation ? En tous les cas, Jésus leur répond sur le ton de l’humour. Il aurait pu être découragé devant la lenteur à croire de ses apôtres. Il aurait pu les rabrouer, ou se moquer d’eux. Non, il se contente de sourire en leur disant qu’en effet leur foi n’est pas plus grosse qu’une graine de moutarde.

Alors, au lieu de s’amuser à déplacer les forêts, les apôtres sont invités à faire humblement ce qu’ils peuvent faire. Au lieu de rêver de devenir les champions du monde de la foi, Jésus leur demande de mettre en œuvre leur foi telle qu’elle est au moment où ils parlent pour accomplir leur mission. Il faut toujours désirer développer notre foi, c’est évident ; mais il ne faut pas attendre qu’elle soit au top niveau pour la mettre en œuvre. Notre foi est déjà grande ? Tant mieux, elle fera des miracles. Notre foi est encore petite ? Elle peut déjà servir. Comment la développer ? Vous savez que c’est en marchant qu’on apprend à marcher ; c’est en croyant qu’on découvre la foi. « Nous sommes de simples serviteurs : nous n’avons fait que notre devoir. » Quand j’étais gamin, la traduction disait : « Nous sommes des serviteurs inutiles … ». Le mot à mot grec dit à peu près ceci : « Nous sommes des esclaves non indispensables … » Je pense qu’on pourrait dire : « Nous ne sommes que d’humbles serviteurs … »Que nous soyons de grands mystiques ou de pauvres pécheurs – d’ailleurs, les grands mystiques sont aussi des pécheurs –  il y a toujours moyen de servir à la table du Seigneur. Il y a tant à faire. Le serviteur fondamental est le Christ lui-même qui s’est fait serviteur par amour pour son Père et pour nous. Nous, nous sommes les serviteurs du serviteur.

Ayant alors accompli notre devoir avec les forces que nous avons, avec la foi qui est en nous, petite ou grande, nous aurons le bonheur d’entendre le Christ nous dire : « Je ne vous appelle plus serviteurs… ; je vous appelle amis. » (Jn15,15) C’est ainsi que Jésus rejoint le prophète Habacuc qui nous disait il y a quelques instants : « Le juste vivra par sa fidélité. » (Ha 2,4)

 

Toussaint et Jour de prière pour les défunts

Fête de la Toussaint

Mardi 1er novembre : Messes à 11h et 18h30

Les prêtres de la paroisse se tiendront à votre disposition pour bénir les tombes au cimetière des Fauvelles de 15h a 17h le mardi 1er novembre.

Jour de prière pour les défunts

Mercredi 02 novembre : Messe à 12h

Les noms des défunts de l’année seront cités au mémento des défunts.

Homélie du 25 septembre 2022   26ème dimanche   Année C

Am 6,1a+4-7     Ps 145     1Tm 6,11-16     Lc 16,19-31

par le père Jean-Paul Cazes

            Une excellente manière de lire les textes bibliques qui nous sont donnés chaque dimanche est de repérer la bonne nouvelle qui s’y trouve. Le Nouveau Testament est tout entier une Bonne Nouvelle ; chaque page est une manifestation de cette Bonne Nouvelle. Il n’est pas nécessaire de connaître le grec et le latin, ni d’avoir entrepris de longues études d’Ecriture sainte, pour trouver la Bonne Nouvelle du jour.

            Il y a deux sortes de bonnes nouvelles si je puis dire. Il y a la Bonne Nouvelle générale, celle qui concerne tout le monde ; généralement, dans les paraboles, comme c’est le cas aujourd’hui, elle se trouve vers la fin : il s’agit de la Bonne Nouvelle de la Résurrection qui est dite sous forme négative : « S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus. » Avec la Bonne Nouvelle générale, il y a aussi la Bonne Nouvelle particulière, celle qui concerne chacun d’entre nous, celle que chacun d’entre nous peut trouver s’il se donne la peine de la chercher ; celle-là, je ne peux pas la trouver à votre place. A vous de la chercher.

            Chercher ainsi la Bonne Nouvelle dans un texte biblique permet de ne pas partir sur de fausses pistes. Une parabole est une histoire inventée par Jésus pour nous faire comprendre une vérité. Un peu, je vous l’ai déjà dit, comme les fables de La Fontaine qui nous délivrent une vérité sous des aspects inventés. Ici, dans notre parabole, il y a au moins deux fausses pistes.

            La fausse piste de l’inversion sociale, et celle de la description du paradis et de l’enfer. L’inversion sociale est celle qui affirme que les pauvres seront riches en paradis, et que les riches perdront tout. C’est une théorie semblable que les communistes nous ont longtemps reprochée car elle permet aux riches de garder leurs richesses ici-bas et de dire aux pauvres qu’ils n’ont qu’à patienter puisqu’ils seront riches plus tard.

            Autre fausse piste : celle de la description du parais et de l’enfer que contient cette parabole. Vous savez bien que le paradis n’est pas un lieu, mais un état, l’état de bonheur d’être avec Dieu pour toujours. De même, l’enfer n’est pas un lieu mais un état, l’état de celui qui est séparé de Dieu à jamais. Pour évoquer cet état de séparation et la douleur de celui qui serait à jamais séparé de Dieu, Jésus utilise deux images fortes : celle du grand abîme, et celle de la fournaise. Mais ce ne sont que des images.

            Après avoir ainsi éliminé les fausses pistes, revenons à la bonne nouvelle de cet évangile qui est le but de notre parabole : le rapport entre l’écoute de la Parole de Dieu et la foi en la résurrection de Jésus. Encore une fois, il s’agit du dernier verset d’aujourd’hui : « S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus. »

            La résurrection de Jésus est le pivot de notre foi. Si le Christ n’est pas ressuscité, écrit Paul, notre foi est vide (1 Co 15,14). Nous ne croyons pas en un Dieu mort, mais en un Dieu mort et ressuscité. Notre mission consiste à annoncer et à témoigner de Jésus vivant. Mais si nous abordons un athée en lui parlant, sans précaution, de la résurrection du Christ, il est fort possible qu’il n’accepte pas notre annonce. Rappelez-vous que Paul lui-même n’a pas été accueilli lorsqu’il a annoncé le Christ ressuscité aux sages d’Athènes ; c’est le moment que représente le tableau qui se trouve dans le chœur de notre église.

            Annoncer le Christ ressuscité est fondamental ; nous n’annonçons pas une doctrine, même si la doctrine est nécessaire à l’intelligence; nous n’annonçons pas une morale, même si la morale est nécessaire pour notre vie quotidienne. Nous annonçons un Dieu vivant qui s’est manifesté dans la personne de Jésus-Christ, mort et ressuscité. Mais la pédagogie qui permet cette annonce passe par la Parole de Dieu contenue dans toute la Bible. Jésus est la Parole de Dieu faite chair ; il est comme l’aboutissement de l’enseignement de Moïse et des Prophètes. Pour accueillir la révélation de la résurrection de Jésus, il est indispensable de s’appuyer sur la Parole de Dieu, lue et méditée.

            Lors de l’enquête sur une meilleure utilisation de nos locaux paroissiaux beaucoup ont demandé une meilleure formation biblique : c’est réjouissant ! Déjà, vous avez tous, à votre disposition, le groupe « Vivre la Bible » qui se réunit environ chaque mois, le groupe de partage des textes bibliques du dimanche qui se réunit chaque semaine. Dans peu de temps, vous aurez des propositions en ce qui concerne l’évangile de St Matthieu. Vous avez aussi les « mini-retraites » trimestrielles dont les dates vous seront données ; ces mini-retraites reposent évidemment sur la parole de Dieu. Et puis, mine de rien, les homélies dominicales vous donnent aussi des clefs de compréhension des textes bibliques; j’espère que vous vous en servez.

            En dehors de notre paroisse, existent beaucoup de propositions de formation biblique, soit en présentiel, soit en ligne ; à vous d’être curieux pour trouver celle qui vous convient.

            La foi en la résurrection du Christ s’appuie et se nourrit de la connaissance de la Bible, Ancien et Nouveau Testaments réunis. La parole écrite de la Bible nous ouvre ainsi à la compréhension et à la foi en la Parole de Dieu faite chair. La parole biblique, inspirée par l’Esprit Saint, nous mène au Christ ressuscité.

Homélie du 26° dimanche C (25 septembre 2022) : journée de rentrée

Lectures : Am 6,1-7 ; Ps 145 ; Tim 6,11-16 ; Lc 16,19-31

par le père Yvan Marechal

La parabole de l’Évangile nous présente deux personnes que tout oppose : d’un côté, un homme riche, anonyme, vautré sur son divan, replié sur ses biens comme un rapace et se suffisant à lui-même ; d’un autre côté, un homme pauvre, appelé Lazare, gisant dans la poussière et mendiant quelques miettes, à la manière d’un chien au pied de la table de son maître. D’un côté, le riche ne voit rien, il ne sait pas ce qu’il y a de l’autre côté de son luxe, il est inconscient ; de l’autre, le pauvre voit, il sait comment vit le riche, il est conscient de la situation injuste. D’un côté, le riche a érigé un mur protecteur infranchissable et se coupe du monde extérieur ; de l’autre, le pauvre voudrait détruire cette forteresse qui les sépare et ne le peut pas.

Cette situation intolérable, nous la connaissons tous, parce que nous voyons encore des pauvres autour de nous et Jésus nous en a averti le jour où il a déclaré : « Des pauvres, vous en aurez toujours avec vous. » Nous observons, par exemple, des clochards qui ont décroché de la société, des gens inadaptés à nos structures, des migrants ou des réfugiés entassés comme des loques humaines. Comment les regardons-nous ? Quelle compassion avons-nous à leur égard ? Chacun peut consulter sa propre conscience.

Dans l’au-delà, cependant, on assiste à une inversion des rôles : le riche devient le mendiant, mais n’obtient rien, car il s’est installé dans une situation définitive ; quant au pauvre, il est porté par les anges dans les bras d’Abraham, il est dans la béatitude. La mise à l’écart du riche est évidemment destinée à nous faire réagir.

Dans les Évangiles, les paraboles racontées par Jésus servent généralement à révéler la personnalité de Jésus. Qui donc est ce Lazare de la parabole ? C’est Jésus, bien sûr, qui s’identifie au plus petit et au plus pauvre et qui n’espère rien d’autre que le secours de son Père, comme il l’expérimentera dans sa Passion. Lazare, c’est donc Jésus qui mendie notre amour. Voilà pourquoi, en se coupant du pauvre, le riche se coupe de Dieu, il ne comprend pas que Dieu mendie son amour et sa miséricorde. Et puisqu’il n’a aucun lien avec Dieu, comment peut-il ensuite mendier l’infini et l’éternité ? Le riche sans compassion se condamne à être exclu d’un regard de compassion envers lui.

Au lieu d’ériger des barrières entre les hommes, ne sommes-nous pas destinés à construire des ponts ? Ainsi, quand le pape François s’exprime au sujet des migrants, et pas seulement aujourd’hui parce que c’est la journée mondiale du migrant et du réfugié, il ne fait rien d’autre que de proposer des ponts, comme Jésus l’exige, même si cela nous dérange tous, et moi le premier ! C’est d’ailleurs tout le sens du mot pontife : le Souverain Pontife, c’est justement celui qui dresse des ponts entre Dieu et les hommes. Ainsi le pape François ne cherche-t-il pas à donner des solutions toutes faites aux gouvernants, il veut engager un nouveau mode de vie entre les hommes, fondé sur la Parole de Dieu. De fait, la Parole de vie nous engage toujours à poser des actes en faveur de la vie. Ce sera toujours un scandale de tuer, et aujourd’hui d’euthanasier. Ce sera toujours un scandale de laisser quelqu’un mourir en pleine mer ou sur un trottoir, sous une tente ou dans un bidonville, comme s’en insurgeait déjà l’abbé Pierre sur le parvis de notre église pendant l’hiver 54.

Jésus n’est-il pas venu briser les portails invincibles que nous avons fermés avec des scellés ? N’est-il pas venu rapprocher les distances infranchissables que nous avons posées entre nous ? Par conséquent, la grande chance de notre foi en Dieu, c’est de pouvoir reconnaître que tout homme est fait à l’image de Dieu. Certes, Jésus réserve sa préférence aux pauvres à cause de leur fragilité et de leur ressemblance avec lui, qui de riche qu’il est par sa divinité s’est fait pauvre en devenant homme. Je veux rendre grâce avec vous pour les associations et les mouvements qui œuvrent en faveur des plus faibles et tendent la main de Dieu : je pense au Secours catholique, à la Conférence Saint Vincent de Paul, au Service Évangélique des malades, qui font le lien entre la paroisse et les personnes ou les familles isolées ; je pense aussi à la Pastorale des peuples qui a le souci des personnes éloignées de leur pays. Saint Charles de Foucauld n’a-t-il pas voulu devenir le frère universel dans le désert du Hoggar ?

Dans la parabole, Lazare se tient devant le portail de la maison de l’homme riche. Le portail de notre église Saint-Pierre-Saint-Paul est un espace qui introduit à l’intérieur de la maison de Dieu et doit donner accès à Dieu lui-même. C’est par le portail qu’entrent les futurs baptisés accueillis sur le parvis le jour de leur baptême. Le porche est l’espace intermédiaire entre le monde profane et le monde sacré, il symbolise le seuil de la communauté chrétienne. C’est là que chaque dimanche se tiennent des laïcs qui vous accueillent au début et à la fin de nos célébrations : non seulement ils vous présentent le bulletin paroissial et le carnet de chants avec le sourire de Dieu, mais ils remplissent un rôle missionnaire prépondérant, car les accueillants sont les premières personnes rencontrées par ceux qui poussent timidement la porte pour voir ce qui se passe ici et peut-être pour faire une première rencontre avec le Seigneur.

Je me souviens d’un jeune homme qui m’avait contacté un jour après être entré dans mon église et avoir été impressionné par le mystère qui y était célébré et chanté ; quelques années après, je le baptisais ! C’est cela l’évangélisation du seuil ! Je pense aussi aux baptêmes et aux mariages que nous fêtons chaque week-end, aux funérailles que nous célébrons, au catéchisme et à l’aumônerie où nous nous investissons beaucoup ; nous touchons là de nombreuses familles éloignées de la foi et de la pratique chrétiennes. Alors, quelle pédagogie mettons-nous en place pour les atteindre, pour les intéresser au Dieu de Jésus-Christ et pour que l’Esprit-Saint les touche ? Je n’oublie pas la Maison paroissiale où nous passerons le reste de la journée. Je souhaite consacrer cette maison comme un lieu convivial, frontalier entre l’Église et le monde, pour que l’Église soit « en sortie » jusqu’aux périphéries et que le monde, qui est aujourd’hui si peu préoccupé de Dieu, puisse y recevoir une parcelle de vie divine. La Maison paroissiale accueillera entre autres des dimanches festifs, des ateliers créatifs et un jardin partagé, nous en reparlerons cet après-midi. Malheureusement l’Église s’enlise trop souvent dans des querelles de chapelles et des conflits d’intérêts, alors que l’évangélisation devrait être sa première préoccupation.

C’est pourquoi je vous lance une fois de plus un appel fort à agir dans un esprit vigoureusement missionnaire. Il y a 40 ans le pape Jean-Paul II appelait l’Église occidentale à une nouvelle évangélisation, non parce qu’il faudrait partir en croisade contre un monde redevenu païen, mais parce que, comme les chrétiens du premier siècle dans les Actes des apôtres, il nous voulait animés par la soif de faire connaître Jésus-Christ et son Évangile. À vue humaine, l’Église perd de sa force et de son influence, mais ne nous résignons pas. Dieu, en effet, ne laissera jamais tomber l’Église qu’il a instituée. Ses moyens, c’est son Saint-Esprit qui nous inspire et nous guide, c’est la Parole de son Fils Jésus qui interpelle chacun, c’est la communauté chrétienne à laquelle nous appartenons, ce sont les sacrements qui agissent efficacement dans nos vies. Son but, c’est que le monde entier croie en lui. C’est ainsi que Jésus nous embarque dans sa mission et nous dit comme à la fin de l’évangile de Matthieu : « Allez ! De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, et apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. »

Pour suivre le Christ dans cet élan missionnaire, la vie spirituelle doit recevoir une force de propulsion, c’est ce que l’on appelle, dans le langage de l’Église, les cinq essentiels de la vie chrétienne : ils sont comme cinq vitamines A, B, C, D et E, vitamines qui donneront à l’Église une dynamique de croissance contre toute forme d’essoufflement. Ces cinq essentiels se trouvent inscrits à la première page du bulletin paroissial. Je vous invite à les lire avec moi.

  • L’adoration : avec cette vitamine, il s’agit dans un premier temps de se reconnaître fils et filles de Dieu, de vivre une relation personnelle et vivante avec le Christ dans l’Esprit Saint, grâce à la prière, à la liturgie et aux sacrements. Nous devons tous, jeunes ou anciens, habiter notre intériorité, réinvestir notre vie spirituelle. L’adoration le jeudi soir jusqu’à 22 h est faite pour cela. Y êtes-vous déjà venus en famille ?
  • La fraternité : c’est vivre en frères et sœurs de Jésus et favoriser l’amour du prochain, l’accueil et le soutien mutuels dans de petites communautés de partage. Chaque groupe paroissial, chaque activité est déjà en elle-même une petite communauté de partage fraternel. Avons-nous conscience d’appartenir à la même famille des enfants de Dieu ? Comment entretenons-nous ces liens dans l’Église ?
  • La formation : devenir disciple du Christ, c’est se mettre à son école et écouter sa Parole pour grandir dans la conversion et l’intelligence de la foi et discerner ses talents. Voulons-nous bien scruter chaque jour l’Évangile pour nous laisser transformer par Jésus ?
  • Le service : en s’engageant dans la communauté chrétienne et en prenant des responsabilités selon ses talents, on devient serviteur pour le bien de tous. Acceptons-nous de servir ou de prendre des responsabilités à la mesure de nos forces physiques, comme le Christ notre roi qui lava les pieds de ses disciples ?
  • L’évangélisation : formé aux quatre étapes précédentes, chacun devient alors un apôtre capable de témoigner de son expérience de l’amour de Dieu et de sa connaissance de Jésus-Christ mort et ressuscité pour nous. Ai-je envie de développer en moi le zèle de l’apostolat ?

Je souhaite que ces cinq essentiels irriguent toute notre vie chrétienne, ils doivent être expérimentés dans toutes les familles et vérifiés dans chaque activité paroissiale à laquelle nous appartenons. Ils deviendront alors un véritable chemin de transformation spirituelle pour toute notre communauté paroissiale.

En regardant le dessin affiché dans l’angle à gauche du  bulletin paroissial, les flèches signalent la puissance de propulsion de ces cinq essentiels. Par conséquent, toute personne qui veut faire un chemin de foi devrait premièrement faire une rencontre vivante avec le Seigneur, deuxièmement s’intégrer dans la communauté chrétienne faite de frères et sœurs, troisièmement se former à l’école de Jésus pour lui ressembler comme l’ont fait les disciples, quatrièmement se mettre au service des autres pour exercer le don de soi et cinquièmement annoncer le Christ et l’Évangile. Le point de départ est l’adoration et le point d’arrivée est l’évangélisation. C’est seulement ainsi que le disciple deviendra à son tour missionnaire : il sera donc un disciple missionnaire, selon une formule qui a été forgée par le pape François. Pour conclure, je vous indique, en bas de la page du bulletin, l’ambition que j’ai pour notre paroisse, pour les années à venir. La voici :

Notre vision pastorale est de construire une communauté paroissiale composée de disciples missionnaires vivant dans une dynamique de croissance grâce aux cinq essentiels de la vie chrétienne. Ces cinq forces devraient nous ancrer davantage dans le Christ et susciter en nous le désir de l’annoncer au monde. Voulez-vous me suivre dans cette aventure ? Amen !

Père Yvan Maréchal